Deux destinées. Deux hommes.
Sur fond d'événements historiques, j'ai tenté de retracer dans ce roman plusieurs parcours de vie liés à la tragédie algérienne. Dans la première partie du livre, le militaire de carrière qui partage le sentiment d'une armée qui se croit trahie, la jeune fille "pied-noir" qui incarne l'Algérie française, les officiers tentés par l'extrémisme sont autant de personnages piégés par cette guerre qui refuse de dire son nom. Dans une seconde partie, un appelé, jeté dans le conflit, découvre différents aspects de ces "événements", des plus paisibles aux plus inavouables. Ces personnages ont pour modèles des témoins ou des acteurs de cette période, dont l'un de mes frères appelé en Algérie.
D'ailleurs, presque rien n'a encore été dit de ces traumatismes qui hantent beaucoup d'entre nous.

Extrait:"Le lieutenant Bir-Hakeim a regagné sa chambre. Elle sent encore l'amour et la lutte. Le lit est resté dévasté par les ébats et les combats. Il n'ouvre surtout pas la fenêtre. Les volets sont clos. Il décroche son grand uniforme.Il le pose à plat sur les draps froissés. Il en détache la veste, le pantalon et la chemise, qu'il fait glisser lentement du pied du lit jusqu'à l'oreiller, en insistant sur l'empreinte des corps.
Puis, il le revêt avec soin.
Il épingle sur sa poitrine ses cinq médailles : une gagnée à Bir-Hakeim dans son trou de désert, une conquise sur les pentes du Monte Cassino sous les ordres du Maréchal Juin, deux autres arrachées aux rizières et aux pitons de l'Indochine, une enfin pour s'être battu dans les djébels. Des rayons de soleil se sont glissés à travers les persiennes et font briller par instants le métal des médailles dans le miroir de la salle de bain. Il repense à la chambre miteuse de l'hôtel de Vialar où elle l'avait rejoint pour la première fois en opération et où le soleil brûlait la tapisserie.
Il referme soigneusement la porte de la chambre, emprisonnant les odeurs..."

Cet ouvrage a obtenu le grand prix du roman de l'A. E. B. en 2015.